La dissonance cognitive (conflit de valeurs) survient lorsqu’un·e intervenant·e doit appliquer des règles qui vont à l’encontre de ses valeurs personnelles. Par exemple, un policier peut être forcé d’expulser une personne itinérante d’un espace public, alors qu’il sait qu’elle n’a nulle part où aller. Cette tension interne peut mener à une fatigue émotionnelle et un désengagement progressif du travail. 1
L’impuissance acquise en contexte d’itinérance est liée à l’accumulation de traumatismes et d’échecs systémiques qui amènent les personnes à perdre espoir et à ne plus chercher activement de l’aide. 2
L'intersectionnalité explique comment différentes formes de discrimination (ex. racisme, sexisme, homophobie, classisme, etc.) peuvent se croiser et s’imbriquer. Par exemple, une femme noire peut vivre à la fois du sexisme et du racisme, ce qui crée une expérience unique. Ce terme aide à mieux comprendre les inégalités complexes vécues par certaines personnes.3
L’itinérance cachée désigne le fait d’adopter des stratégies de survie invisibles (ex. dormir dans une voiture, rester dans un lieu public, faire du couchsurfing, échanger du sexe contre un toit, etc.) plutôt que de s’exposer au jugement et à de potentielles violences dans les refuges. Cette réalité est particulièrement marquée chez les femmes et les personnes trans et non-binaires qui subissent des violences accrues. 4
Le profilage social désigne les interventions policières ou institutionnelles ciblant de façon disproportionnée les personnes en situation d’itinérance en raison de leur apparence, leur genre, leur statut social ou leur comportement perçu comme « dérangeant ». 5
La stigmatisation sociale désigne le jugement ou le rejet d’une personne en raison de sa pauvreté, de sa consommation ou de son genre. Ces jugements nuisent à son accès à des ressources essentielles et renforcent son exclusion. 6
Le trauma dans le contexte de l’itinérance désigne les blessures psychiques liées à des violences répétées (physiques, sexuelles, institutionnelles, etc.) vécues souvent dès l’enfance et qui peuvent être intergénérationnelles. Ces expériences marquent profondément le rapport à soi, aux autres et aux institutions. Le manque de reconnaissance et de soutien peut exacerber la détresse et freiner l’accès à l’aide. 7
1 Festinger, L. (1957). A Theory of Cognitive Dissonance.Adaptée au contexte social : cette notion a été largement reprise dans les travaux sur les métiers relationnels et les conflits éthiques dans les milieux d’intervention (ex. Marie-Christine Saint-Jacques, U. Laval, ou les travaux sur la fatigue de compassion).
2 Seligman, M.E.P. (1975). Learned Helplessness: On Depression, Development and Death.Application en itinérance : souvent reprise par des organismes comme le Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM) ou le CREMIS, dans une perspective critique des systèmes d’aide.
3 Crenshaw, K. (1989). Demarginalizing the Intersection of Race and Sex…Concept fondateur de l’intersectionnalité. Très utilisé dans les milieux féministes, queer, et communautaires (ex. Femmes Autochtones du Québec, Égides).
4 Gaetz, S., Gulliver-Garcia, T., & Richter, T. (2014). The State of Homelessness in Canada.Bouchard, M. et al. (CREMIS, 2017). Les femmes et l’itinérance cachée à Montréal.Terme utilisé dans plusieurs publications du RAPSIM, CREMIS et Centraide.
5 Commission des droits de la personne du Québec (2009). Profilage social et discrimination.Clinique Droits Devant, RAPSIM, Ligue des droits et libertés.Études de Catherine Tremblay ou Francine Pelletier sur le profilage à Montréal.
6 Goffman, E. (1963). Stigma: Notes on the Management of Spoiled Identity.Utilisation moderne : Link & Phelan (2001) sur la stigmatisation structurelle.Adapté au contexte québécois dans des publications du CREMIS, Observatoire des inégalités.
7 Judith L. Herman (1992). Trauma and Recovery.Concepts de trauma complexe (C-PTSD), trauma intergénérationnel (ex. autochtones, survivantes d’abus).
Intégré dans les approches informées par le trauma (trauma-informed care), utilisées par les Maisons de l’Ancre, Résilience Montréal, etc.